La diffamation n’est pas le premier comportement auquel on pense lorsqu’on évoque l’évitant dédaigneux sévère. On l’associe plus volontiers au silence, au retrait, à la froideur émotionnelle. Et pourtant, dans certaines situations — notamment après une rupture ou un stop clair — la diffamation peut apparaître comme une stratégie défensive majeure.
Il est important de comprendre que, chez l’évitant dédaigneux sévère, la diffamation s’inscrit souvent dans un mécanisme de protection narcissique face à une menace ressentie : perte de contrôle, atteinte à l’image de soi, dévoilement de l’incohérence relationnelle.
Lorsque la victime dit stop, elle retire à l’évitant un pilier essentiel : le rôle implicite de celui qui maîtrise la distance. Ce renversement est vécu comme une humiliation interne. Et ce qui n’est pas tolérable intérieurement doit être déplacé à l’extérieur. La diffamation devient alors un moyen de réécrire le récit. L’évitant dédaigneux sévère peut présenter la victime comme instable, excessive, toxique, manipulatrice ou dépendante. Non pour décrire la réalité, mais pour restaurer une cohérence interne mise à mal.
Ce mécanisme repose souvent sur un retournement de responsabilité. Ce qui relevait de son propre retrait devient une réaction légitime à un prétendu excès de l’autre. Ce qui relevait de son indisponibilité devient une défense contre une soi-disant intrusion. Ainsi, la victime est transformée en coupable. La diffamation peut prendre plusieurs formes : des propos dévalorisants partagés dans l’entourage, une mise en doute de la santé mentale de la victime, une banalisation de la relation (« ce n’était rien »), ou une victimisation inversée où l’évitant se présente comme persécuté.
Ce qui rend cette expérience particulièrement traumatisante, c’est que la victime reconnaît parfois dans ces discours des éléments qu’elle a elle-même confiés dans l’intimité. Ses vulnérabilités, ses blessures, ses mécanismes de survie sont alors utilisés contre elle. Cela crée un sentiment profond de trahison et d’insécurité.
La diffamation permet à l’évitant dédaigneux sévère d’éviter plusieurs choses à la fois : la honte,
la remise en question, et la confrontation à l’impact réel de ses comportements. Elle agit comme un écran protecteur entre lui et la réalité du lien.
Il est essentiel de souligner que tous les évitants dédaigneux ne diffament pas. Mais lorsque ce comportement apparaît, il signale généralement un niveau élevé de fragilité narcissique et une incapacité à tolérer la perte sans attaquer l’image de l’autre.
Pour la victime, les effets sont souvent dévastateurs. La diffamation ravive le traumatisme relationnel. Elle donne l’impression d’être effacée, déformée, niée dans son vécu. Elle peut entraîner un isolement social, une perte de confiance, une confusion identitaire.
Face à cela, la tentation est grande de se justifier, de prouver, de rétablir la vérité. Mais entrer dans cette lutte narrative revient souvent à rester prisonnier du lien. La réparation ne passe pas par la confrontation directe, mais par la reconnaissance intérieure de sa propre réalité.
Se protéger implique parfois de poser des limites claires, de réduire les contacts, de s’entourer de personnes capables d’entendre une parole nuancée. Dans certains cas, un accompagnement thérapeutique ou juridique peut être nécessaire.
Il est fondamental de rappeler ceci : être diffamé ne dit rien de ta valeur, mais beaucoup de l’incapacité de l’autre à assumer la perte et la responsabilité.
La vérité d’une relation ne se joue pas dans les récits publics, mais dans ce que chacun a vécu intérieurement. Et aucune diffamation ne peut effacer ce que tu sais avoir traversé.
Comprendre le lien entre évitement dédaigneux sévère et diffamation n’excuse évidemment aucun de ses comportements. Cette compréhension sert surtout à désamorcer l’impact de la diffamation et à remettre les comportements dysfonctionnels à leur juste place : celle d’un mécanisme de défense extrême, face à un stop qui a retiré toute illusion de contrôle. Même non dit, ce stop est ressenti par l’évitant dédaigneux sévère qui sent l’illusion de son contrôle lui glisser entre les mains. Et pour la victime, cette compréhension peut devenir un appui solide : non pour se battre, mais pour se dégager de l’emprise de l’évitant dédaigneux et du lien..
