Tu n’auras que ma paix
Non, la vie n’est pas un long fleuve tranquille. Elle nous propose parfois des événements bien plus difficiles que d’autres. Certaines rencontres nous marquent à jamais. Parfois belles. Parfois moins faciles.
Celle-ci fut d’abord merveilleuse, puis rapidement, elle est devenue mon pire cauchemar. Un miroir qui m’a révélée à moi-même. Si intensément que cela était absolument déconcertant. La rencontre m’a reconnectée à la Lumière divine d’amour inconditionnel et simultanément elle a réveillé toutes mes ombres. Dans l’absence de cet autre, je me suis retrouvée face à moi-même et à toutes mes blessures. j’ai sombré dans mes abysses, mes tréfonds, ma nuit noire de l’âme. Face à l’ampleur de la douleur, j’ai voulu mourir, mais le regard que je portais alors sur le monde trouvait cela ridicule. Il aurait nécessairement fallu revenir dans une prochaine vie pour continuer le chemin de guérison de l’âme. Autant le faire dès à présent et le plus possible. Nulle envie de revenir à nouveau dans ce monde absurde. Alors, j’ai commencé a affronté mes ombres ou plutôt, j’ai appris à les accueillir, avec douceur, tendresse, compassion…
Face à l’intensité de ce que la rencontre a réveillé, cet autre a préféré fuir. Parce que tous ses masques sont tombés et que la sensation de vulnérabilité ressentie lui était alors absolument insupportable. Fuir plutôt que de reconnaître et d’accueillir ses propres dysfonctionnements pour s’en libérer. Tenter de continuer tant bien que mal de porter des masques afin de maintenir l’illusion. Il est souvent plus facile d’en vouloir à quelqu’un plutôt que de prendre la responsabilité des blessures que nous portons.
Quand la vie nous présente un miroir et que nous voyons soudain que, sous les masques, nous avons un gros bouton disgracieux, la tentation de vouloir briser le miroir et remettre le masque est forte pour certains… Surtout lorsque l’on perçoit l’intensité du travail intérieur à réaliser pour prendre soin de soi et de son corps afin de voir ce bouton disparaître. Il ne faudrait tout de même pas que les autres puissent voir ce bouton disgracieux… Surtout quand on cherche à se montrer parfait aux yeux du monde…
Si briser le miroir est souvent plus rapide et (a priori) plus facile, cela ne résout évidemment pas le problème…
Il faut beaucoup de courage pour reprendre la responsabilité des blessures que nous portons.
Mais cet autre a tenté de briser le miroir que je représentais, malgré moi, dans cette relation. Plusieurs fois. Avec violence et hargne. Si bien que j’ai tout de même fini par comprendre la toxicité qui régnait ici, l’absence de remise en question de cet autre, le chaud-froid qui te maintient ni trop près ni trop loin afin de ne pas réveiller trop intensément sa blessure de rejet et continuer de croire à l’illusion de son contrôle sur la relation et finalement sur sa vie toute entière… Se croire parfait et invulnérable et rejeter tous les torts sur moi, avec véhémence et l’orgueil de se croire arrivé à l’aboutissement d’un chemin de développement personnel.
Pour ma part, j’ai plongé. En moi. Dans ces abysses que la Vie ne me laissait pas le choix que d’explorer. J’ai douté de moi. Mille fois. Dix mille fois. Je me suis remise en question encore et encore. J’ai voulu poser les mots sur ma souffrance et laisser un espace à cet autre pour en faire autant. Deux personnes bienveillantes et respectueuses ne peuvent pas agir ainsi, pensais-je. Nous devons nous expliquer pour que chacun comprenne, accepte, reconnaisse la vision de l’autre, et continue son chemin de la meilleure manière qui soit. Je n’ai reçu que silence, déni, violence, rejet, colère, hargne, rage. Et chaque réaction de sa part, dans le silence et la violence, maintenait son emprise invisible sur moi et mon besoin de clore cette relation « proprement », dans un respect mutuel que je ne recevais pas.
J’ai pardonné. Mille fois. Dix mille fois. Je me suis faite discrète, petite. J’ai fait en sorte d’ettouffer mes propres besoins pour acceuillir les siens. J’ai pris sur moi. J’ai reculé pour lui laisser de la place. J’ai fini par comprendre sa peur incommensurable de l’engagement. J’ai compris que pour certains les sentiments sont perçus comme une dépendance dont on est prisonnier et qu’ils préfèrent se cacher derrière une pseudo-indépendance en fuyant plutôt que d’admettre leurs dysfonctionnements et leurs sentiments en bloquant l’accès à leur cœur et en se réfugiant dans leur orgueil. Ils ne voient pas à quel point ils sont eux-mêmes déjà prisonniers et dépendants de leur peur du rejet, de leurs masques et de l’image parfaite qu’ils cherchent à renvoyer à la société, en vain…
En ce qui me concerne, toujours, au fil du temps, j’ai continué d’accueillir les blessures réveillées en moi avec le plus de compassion et de tendresse possible.
Jusqu’à cette fois de trop ! Cette fois où les limites de l’intégrité physique ont été dépassées. Cette fois où ses menaces étaient trop violentes, ses cris trop intenses, et où sa diffamation ne se cachait même plus… Les masques lui devenaient impossibles à porter et l’énorme bouton disgracieux qui se dévoilait alors était vraiment vraiment très laid ! Incapable de se remettre en question, la seule solution qui lui apparaissait alors était de briser le miroir !… La guerre était déclarée !
Mais moi, dans ma chute, j’ai compris. Enfin. Ses jeux pervers. Son retournement de responsabilité. Ses rôles successifs de bourreau et de victime. Son attachement évitant dédaigneux sévère. Sa peur d’aller voir à l’intérieur et de ne rien y trouver. Ses masques et ses faux-semblants. Son immaturité émotionnelle. Son incompétence. Son incongruence. Sa lâcheté. Et sa trouille incommensurable face à l’invitation générée par la rencontre : visiter l’intérieur, guérir ses blessures, et oser enfin accueillir sa vulnérabilité afin de se défaire de tous masques, de tous costumes et de toutes armures dans le but de se montrer au monde dans sa pleine authenticité. Il faut être prêt pour entreprendre un tel voyage. Il faut être fort, intérieurement.
Pour ma part, je continuerai mon chemin sur cette voie. Parce qu’à mes yeux, c’est le seul chemin qui mène à la Paix et à la Joie. C’est ce chemin qui nous permet de dépasser nos épreuves. C’est ce chemin qui élève l’âme. C’est ce chemin qui nous mène à l’Amour Inconditionnel de Tout ce qui Est. Et je ne veux que la Paix. Je continuerai de pardonner, mais plus avec l’espoir de voir cet autre revenir. Non. Simplement parce que le pardon est nécessaire pour que la paix perdure en moi. Je ne nourrirai pas la guerre. Je ne sacrifierai plus ma joie. Je ne dilapiderai plus mon temps et mon énergie dans une voie à sens unique et sans issue.
Il m’a fallu du temps pour comprendre. Beaucoup de temps, même si je sais que ce chemin était nécessaire et que chaque expérience me permet d’avancer vers mon propre alignement. Alors, je me pardonne aussi moi-même pour mes propres comportements dysfonctionnels passés.
Je n’entretiendrai pas le combat dans lequel tu souhaites m’emmener. Je te laisse à tes luttes intérieures. Je te laisse face à toi-même. Sans masque. Face à ton propre miroir. Je n’entretiendrai pas la guerre. Tu ne m’entraineras pas dans ta vision belliqueuse et duelle du monde. Il y a bien longtemps que je sais que ce n’est pas nécessairement celui qui crie le plus fort qui a raison. Je n’ai pas besoin de crier. Tu luttes contre toi-même. Je te laisse face à ta rage. Et en agissant ainsi, malgré ce que tu crois, je ne suis pas faible. Bien au contraire, je sais que cela demande bien plus de force de maintenir la paix que de sombrer dans le combat. Tu sembles te nourrir de ma peur, de ma colère, de ma rancœur ou de mon ressentiment. Je ne te les offrirai pas. Ma vengeance sera mon pardon. Tu n’auras que ma paix.
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